Sarcopénie et sports d’endurance
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Par Jean-Baptiste WIROTH, PhD /écrit pour/ Trimax Triathlon Magazine
Docteur en Physiologie de l’Exercice
Fondateur du réseau de coach WTS
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La sarcopénie correspond à une perte involontaire de masse et de force musculaire chez une personne âgée en bonne santé.
Elle touche principalement les personnes âgées sédentaires, mais affecte aussi dans une moindre mesure les athlètes masters .
Un peu d’histoire
La sarcopénie est un concept physiologique relativement récent, puisque ce n’est qu’en 1989 qu’il a été décrit par Rosenberg.
La sarcopénie, qui n’épargne aucun mammifère, a été observée dans de nombreuses études transversales (Lindle et al., 1997 ; Lynch et al., 1999), et longitudinales (Frontera et al., 2000).
Même si l’exercice et l’entraînement ont des effets protecteurs indéniables, les athlètes masters doivent tout faire pour prévenir la sarcopénie.
Un peu de physiologie
Sur le plan chronologique, le phénomène de fonte musculaire débute dès 30 ans, chez des personnes particulièrement sédentaires.
Néanmoins, on considère que le processus s’accélère significativement à partir de 60 ans (Waters et al., 2000 ; Hébuterne, 2003).
Au niveau cellulaire, la sarcopénie se traduit par une diminution importante du pool protéique musculaire squelettique, ce qui se traduit dans les faits par une perte progressive de masse musculaire.
Les fibres musculaires diminuent tant en nombre qu’en taille, conduisant ainsi à la diminution de la surface de section musculaire (Waters et al., 2000).
D’un point de vue myo-typologique, il semble que la sarcopénie touche surtout les fibres de type II dites “rapides”. A l’opposée, les fibres de type I, dites “lentes”, semblent relativement épargnées (Roubenoff, 1999).
Effets sur la fonction musculaire
L’altération structurelle du muscle a des conséquences majeures au plan fonctionnel. De fait, la sarcopénie s’accompagne, tant chez l’homme que chez la femme, d’un déclin de la force, de la vitesse, et de la puissance musculaire (Lindle et al., 1997), et ce, quel que soit le mode de contraction musculaire (concentrique, excentrique, ou isométrique).
Indirectement, ce processus conduit, à terme, à une diminution des capacités physiques, et à long terme à la diminution de l’autonomie des personnes très âgées.

En effet, il existe une relation en cascade négative qui régit la fonction musculaire. La perte initiale de masse musculaire induit inéluctablement une diminution de la force musculaire, laquelle engendre une baisse des capacités fonctionnelles, et donc, une baisse du niveau d’activité physique. En retour, cette hypokinésie vient potentialiser la fonte musculaire par suppression de l’effet trophique de l’exercice. Le résultat de ce processus se traduit par la perte d’autonomie et le risque accru de chutes (Roubenoff, 1999).
Les causes de la sarcopénie
Bien que toutes les causes de la sarcopénie ne soient pas encore clairement identifiées, un certain nombre de phénomènes y contribuent de manière plus ou moins directe.
Outre le vieillissement per se, la carence d’apports nutritionnels en protéines (Castaneda et al., 1995, Hébuterne, 2003) et la sédentarité (Roth et al., 2000), figurent parmi les principaux facteurs qui régulent négativement la sarcopénie.
Cependant, d’autres pistes sont explorées, telles que :
- La dégénérescence neuronale au niveau de la moëlle épinière. Ce phénomène peut potentiellement conduire à l’atrophie, puis à la disparition des fibres musculaires concernées (Doherty et al., 1993 ) ;
- La diminution de la production hormonale : Testostérone, IGF-1 (Castaneda et al., 2000 ; Grounds, 2002) ;
- L’augmentation de l’expression des gènes propres à la myostatine (Marcell et al., 2001) ;
- La perturbation du métabolisme protéique en réponse à un stimulus physique, alimentaire (Volpi et al., 1999), ou hormonal (Volpi et al., 2000) ;
- L’augmentation de la production de cytokines pro-inflammatoires, telles que les IL-1 et IL–6, le TNF-α et l’interferon γ (Mitch, 1997 ; Barbieri et al., 2003).
En pratique
1- Comment diagnostiquer une sarcopénie ?
L’évaluation de la sarcopénie passe principalement par des mesures de composition corporelle, permettant de calculer la masse grasse et la masse maigre.
Ces mesures permettent de mettre en évidence la fonte musculaire.
Il est à noter que la fonte musculaire peut être masquée par une augmentation concomitante de la masse grasse : ainsi la simple mesure du poids ne suffit pas à caractériser une sarcopénie (Gallagher et al., 2000).
Parallèlement aux mesures de composition corporelle, les évaluations de force musculaire permettent d’objectiver efficacement la sarcopénie et ses conséquences fonctionnelles.
2- Le traitement de la sarcopénie chez la personne sédentaire
a. L’exercice physique.
Initialement, Walter Frontera a été le premier à montrer l’utilité et l’efficacité du renforcement musculaire, pour lutter contre la sarcopénie chez des hommes âgés en bonne santé (Frontera et al., 1988). Deux ans plus tard, la même équipe a démontré le même type de résultats chez des personnes très âgées et fragilisées : dans cette étude, 10 sujets âgés en moyenne de 90 ans avaient été réentraînés en force maximale pendant 8 semaines, et avaient vu leurs performances augmentées de 74 % (Fiatarone et al., 1990). Depuis, de nombreux travaux ont continué à démontrer que le renforcement musculaire, progressif et adapté, est un moyen sûr (Bermon et al., 2000), efficace, et économique, pour augmenter la force et la masse musculaire, et limiter la sarcopénie chez la personne âgée (Roth et al., 2000).
b. La supplémentation orale
…En protéines ou en acides aminés. Bien que l’unanimité sur le thème ne soit pas totale, la supplémentation orale en acides aminés essentiels, semble efficace pour stimuler l’accrétion protéique musculaire chez le sujet âgé sain, en dépit d’une extraction splanchnique supérieure à celle du sujet jeune (Volpi et al., 1999). Ce procédé est particulièrement efficace s’il est concomitant à un entraînement de force (Fiatarone et al., 1994).
c. Les traitements hormonaux
…De longue durée, à l’aide de facteurs de croissance, tels que l’hormone de croissance ou l’IGF-1, n’ont pas confirmé les espoirs mis en eux (Friedlander et al., 2001 ; Taaffe et al., 1996).
En pratique
D’une part, il est maintenant certain que l’entraînement physique de type musculation est un moyen efficace pour prévenir et limiter la sarcopénie chez le sujet âgé sain.
En conséquence, l’utilisation de l’entraînement physique de type “force”, couplé à une alimentation enrichie en protéines, permet de limiter le phénomène de sarcopénie.
Chez les sportifs d’endurance vieillissants, l’incorporation de séances de renforcement musculaire devient de plus en plus importante avec les années qui passent.
Ainsi il ne faut pas hésiter à inclure des séances de renforcement musculaire à sa routine d’endurance. Chaque semaine, il est recommandé de faire :
-> 1 à 2 séances à visée “ force maximale” ou “puissance maximale” (musculation, crossfit… etc)
-> 1 à 2 séances à visée mobilité / équilibre (yoga, pilates ..)
Sur le plan nutritionnel
▪️Protéines : tendre vers 2 g / kg de poids corporel / jour, soit 120g de protéines pures pour un sportif ou une sportive de 60kg .
▪️Calories : augmentez votre ration calorique les jours d’entraînement, en vous alimentant à chaque séance.
Dans la même logique, prenez soin de toujours prendre une collation protéino-énergétique dans les 2 heures qui suivent chaque entraînement.
Exemples de collation :
-> Smoothie : 20g de protéines de pois / banane / beurre de cacahuète / miel
-> Sandwich jambon / pain / salade
-> Fromage blanc / fruits rouges / miel / amandes
Suppléments
Peu de suppléments s’avèrent être utiles et efficaces. Cependant on peut mentionner :
-> La protéine de petit lait (whey protein) pour son apport global en acides aminés.
-> Les acides aminés ramifiés (leucine, isoleucine et valine) peur leur côté “essentiel” ; aussi appelés BCAA.
-> La créatine pour ses effets ergogènes, avant les séances de force / puissance. A consommer à raison de 5g par jour avant les entraînements.
L’avis de l’expert“Je suis un coureur à pied de 70 ans, adepte de marathons (record en 3h29), et semi-marathons (record en 1h41). Je constate que je perds en force de manière inexorable. Comment remédier à ce phénomène, sachant que je n’aime pas aller en salle de musculation ?” Je vous invite donc à faire 2 séances de renfo chaque semaine, en incluant des mouvements poli-articulaires, si possible avec travail de l’équilibre : – Fentes en avançant, – Squats sur une jambe, – Appui unipodal sur la point du pied, – Travail de mollets avec extension des chevilles. Profitez-en pour travailler le gainage du tronc et du dos, ainsi que les bras et les épaules : – Pompes, – Dips, – Traction (avec élastique si besoin), – Planche faciale ou latérale. Vous pouvez faire ces exercices chez vous, dans votre jardin ou dans un parc, en travaillant avec votre poids de corps, des élastiques ou des poids additionnels (kettlebells). Si vous utilisez des poids additionnels, l’objectif est à terme, de pouvoir travailler avec une charge correspondant à +/- 30% de votre poids corporel. |
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